AXE ENGAGEMENT, MOBILISATION, CONCERTATION
Procédures d’implication, systèmes de croyances et dynamiques d’engagement dans une controverse éolienne en Suisse Occidentale.
Pierre-Henri BOMBENGER (Haute école spécialisée de Suisse Occidentale/HES-SO ; Haute école d’ingénierie et de gestion du Canton de Vaud /HEIG-VD ;Institut G2C/Équipe PlanI-D)
Adeline CHERQUI (Université de Lausanne/Institut de hautes études en administration publique – IDHEAP)
Kevin BLAKE (Université de Lausanne/Institut de hautes études en administration publique – IDHEAP)
Marie-Joëlle KODJOVI (Haute école spécialisée de Suisse Occidentale/HES-SO ; Haute école d’ingénierie et de gestion du Canton de Vaud /HEIG-VD ;Institut G2C/Équipe PlanI-D)
En 2011, les autorités fédérales suisses décident de l’abandon progressif de la production électrique nucléaire et engagent le pays dans une stratégie de transition énergétique s’appuyant notamment sur le développement de la filière éolienne. Cette communication traite plus particulièrement d’un projet de parc éolien pilote débuté il y a près de 17 ans dans les montagnes jurassiennes de Suisse occidentale. Sur la base de cette étude de cas réalisée dans le cadre du projet FNS Gouvéole notre analyse questionne sur une période étendue les évolutions des dynamiques de mobilisation et d’engagement des acteurs autour d’un projet énergétique en suivant deux entrées complémentaires.
D’une part, notre travail met en évidence sur près de deux décennies les évolutions des procédures et processus institutionnels d’implication des acteurs dans les projets éoliens. Loin d’être constant, le cadre institutionnel d’autorisation des projets s’est particulièrement complexifié en raison de la multiplication des activités régulées par les politiques publiques d’aménagement. L’enjeu de coordination qui en résulte entre les multiples dispositifs réglementaires municipaux, cantonaux et fédéraux, se double d’une ouverture accrue de ces dispositifs aux usagers des territoires. Ces derniers parviennent de manière croissante à jouer avec, voire à générer, de nouvelles règles procédurales afin d’orienter le processus d’autorisation des parcs éoliens. Ce cas d’étude met en évidence le rôle particulier des articulations entre les démarches de concertation et le pouvoir référendaire dont disposent les citoyens dans le contexte de démocratie directe suisse.
D’autre part, notre étude analyse sur le moyen terme les évolutions des coalitions d’acteurs impliquées autour de deux axes en particulier. Premièrement, dans une approche basée sur le cadre conceptuel des coalitions argumentatives, l’analyse porte sur les dynamiques de construction et de recomposition des groupes d’acteurs autour de croyances et représentations communes. Deuxièmement, à une échelle plus fine et dans une approche basée sur une sociologie des mouvements sociaux et du militantisme, elle étudie la recombinaison de ces collectifs en portant attention aux relations entre acteurs, aux échanges de ressources (notamment relationnelles, juridiques et organisationnelles) et aux trajectoires sociales qui les conduisent à se positionner de manière stratégique dans l’une ou l’autre des coalitions de valeurs.
Au final, cette communication propose un éclairage original sur la question des controverses environnementales générées par la question énergétique en replaçant l’analyse dans le temps long des transformations des différentes échelles de territoire dans lequel elle s’exprime.
MOTS CLÉS : éolien, Suisse, procédure, engagement, systèmes de croyances.
Le miroir de la « démocratie technique ». Étude du conflit autour de la ligne Très Haute Tension France-Espagne.
Laurence Raineau (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne/Centre d’Étude des Techniques, des Connaissances et des Pratiques – Cetcopra)
Aurélien Cohen (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne/Centre d’Étude des Techniques, des Connaissances et des Pratiques – Cetcopra)
Notre communication se propose de réfléchir à la place du citoyen et de l’usager dans la transition énergétique, et sur le sens que peut avoir la séparation de ces deux « acteurs ».
C’est à partir d’un travail de terrain sur un projet de ligne à très haute tension dans les Pyrénées Orientales, que nous engagerons cette réflexion. Le moment où les grandes infrastructures s’implantent sur le territoire fait apparaître le macro-système électricité à l’échelle locale, et donne, en quelque sorte, une présence matérielle à l’énergie. Les acteurs locaux se trouvent ainsi souvent impliqués dans des problématiques sur lesquelles ils n’avaient jusqu’alors pas prise. Le projet de ligne THT a, de cette façon, amenée la constitution d’un collectif et d’une réflexion des acteurs locaux sur les possibles transitions énergétiques. La consultation autour de ce projet de ligne THT, qui s’est rapidement transformée en conflit, a vu s’opposer aussi bien les militants aux experts que les experts entre eux. De conflit en controverse, le discours des militants s’est vu canalisé dans une problématique scientifique, circonscrite aux contre-expertises sur les évaluations économiques et sanitaires. Dans le but de maintenir la mobilisation et de rester des acteurs de poids, les militants ont été obligés de renoncer aux débats plus ouverts sur les transitions énergétiques et les choix de société qui leur sont attachés. Cette controverse a malgré cela bien abouti au compromis entre pouvoir politique, scientifique et pouvoir local qui caractériserait les « forums hybrides » (Michel Callon, Arie Rip, 1092 ; Michel Callon, Pierre Lascoumes, Yannick Barthe, 2001) : la ligne THT sera bien construite mais elle sera enterrée (ce qui multipliera son coût par 4). Ce conflit est en cela un exemple parfait d’une participation du profane (qui s’est toutefois fait spécialiste) dans l’élaboration de la décision finale, une décision finale collectivement élaborées et qui a su réintroduire les réalités locales.
Mais on peut aussi voir ici, dans cette nouvelle façon d’impliquer les acteurs dans le devenir du système énergétique, une forme de domestication des mobilisations, qui serait donc peut être la condition (et la limite) de la « démocratie technique » (Callon). La parole du citoyen est prise en compte dans les limites d’un débat dont les bornes sont fixées d’avance. Et le citoyen de la « démocratie technique » se fait peut être acteur de la transition énergétique, mais ne peut jamais devenir acteur du système énergétique. La fracture entre l’usager et l’énergie, entre les choix techniques et l’évolution des pratiques, entre la science et le sens commun, entre « l’Environnement » et les environnements est donc toujours vivante (malgré les tentatives pour la combler) et n’est pas mise en cause par les controverses. Elle nous apparaît pourtant être au cœur des problèmes auxquels devra répondre la transition énergétique.
MOTS CLÉS : conflit socio-environnemental; usager; démocratie technique; transition énergétique; ligne THT.
Au-delà du Nimby : registres de justification et économie des mobilisations contre des projets de parcs éoliens. Études de cas audois et ariégeois
Stéphanie DECHEZELLES (Institut d’Études Politiques d’Aix-en-Provence/CHERPA)
La France s’est lancée depuis les années 2000 dans la promotion des énergies renouvelables dans la part globale de l’électricité produite et consommée nationalement. Localement, cette politique se décline en de multiples projets de parcs. Concernant la source éolienne, deux départements limitrophes mais contrastés offrent la possibilité d’investigations comparées stimulantes. D’un côté, l’Aude fait figure de territoire pionnier compte-tenu notamment des caractéristiques de son régime des vents et l’importance numérique des installations sur son territoire. De l’autre, l’Ariège ne compte pour l’heure aucun parc en dépit de nombreux démarchages de la part de promoteurs. Dans ces deux départements, de nombreux collectifs se sont constitués pour s’opposer à de nouveaux projets. Les procédures mettant en œuvre des dispositifs de participation du public (consultations et enquêtes publiques) constituent pour ces opposants des épreuves intenses et pour le chercheur des fenêtres particulièrement intéressantes en vue d’interroger et de comprendre les ressorts des mobilisations.
Fortement contraints par la très grande technicité des dossiers, les membres des collectifs en lutte tentent néanmoins de concurrencer les institutions publiques, les sociétés privées ou encore les bureaux d’études spécialisés, dans un maximum de domaines d’expertise. Fourbissant des arguments (contre)experts qu’ils tirent de leurs expériences biographiques, trajectoires professionnelles ou encore soutiens via leurs réseaux d’interconnaissance, les opposants aux projets éoliens étudiés ne se cantonnent toutefois pas au registre « froid » de l’expertise technique. Ils opèrent également, selon certaines conditions, des formes d’hybridation avec des registres sensibles (affection pour le territoire, évaluations esthétiques, patrimonialisation des expériences ordinaires…) qui peuvent parfois être entendus par les pouvoirs publics. En effet, pour ces derniers, ces registres affectifs ou ces appréciations « relatives » ne sont pas totalement étrangers aux nouvelles formes d’action publique territoriale (labellisations, classement, démocratie participative…).
Ainsi les diverses parties en présence se trouvent engagées dans une course à la production de critères d’évaluation et d’argumentation balançant entre plusieurs régimes de justification et différentes échelles de légitimité. On s’attachera notamment à montrer comment, loin de ne mobiliser que des arguments experts ou valables en toute généralité, les opposants cherchent à les articuler et les combiner à des modalités plus émotionnelles et localisées de la contestation.
On cherchera notamment à aller au-delà des qualifications de « NIMBY » opérées tant par certains acteurs du secteur que par certains chercheurs, qui occultent plus qu’elles n’analysent les raisons qui poussent certains, y compris parmi les plus soucieux de sobriété énergétique ou de protection de l’environnement, à s’opposer à ces projets.
La communication s’appuiera un corpus composé d’une trentaine d’entretiens semi-directifs, de documents d’orientation et rapports territoriaux, de nombreuses sessions d’observations directes et participantes, de supports d’expression associatifs, de dossiers de candidature de compagnies éoliennes, de bases de données naturalistes, de registres d’enquêtes publiques.
MOTS CLÉS : mobilisations, énergie éolienne, controverses, démocratie participative, expertise.
Défier la « révolution du gaz de schiste » : politiques néolibérales et mouvements anti-fracking.
Roberto CANTONI (École des Ponts Paris Tech/UMR CNRS 8134 LATTS)
Selon un rapport de 2011 par l’Agence internationale de l’énergie, le monde est entré dans un « âge d’or du gaz ». Indéniablement, cette affirmation a été motivée par les changements radicaux apportés par des sources non conventionnelles de gaz aux marchés de l’énergie : en particulier, cela est le cas pour le gaz de schiste. Les découvertes de gaz aux EE.UU. ont conduit à une transformation du marché américain, et l’Europe commence aussi à être touchée par ce phénomène : des campagnes de prospection de gaz de schiste ont déjà commencé dans un certain nombre de pays européens, notamment en Pologne et au Royaume Uni. Tout en incluant mon analyse dans le cadre géopolitique plus large du commerce du gaz naturel, je me propose d’abord de montrer comment les attitudes des gouvernements européens à l’égard de l’exploitation de cette ressource non conventionnelle sont caractérisées, en suivant des agendas politiques néolibérales, par des enjeux géostratégiques centrés sur l’autonomie énergétique et sur une logique d’ordre purement économique.
Deuxièmement, j’analyserai l’émergence de mouvements s’opposant à l’industrie de l’exploitation des gaz de schiste et à des pratiques matérielles perçues comme susceptibles de comporter des risques très concrets de pollution, causés par les activités de fracturation hydraulique (fracking) à la base de cette exploitation. Je montre comment l’industrie a sous-estimé la complexité, la portée et l’influence du mouvement anti-fracking, et a interprété les protestations comme s’il s’agissait de « syndromes NIMBY» se faisant passer pour de l’écologisme. Mon étude montre au contraire que les mobilisations sont fondées sur une coalition d’intérêts divers et idéologiques acquis, qui ont peu de chances de se laisser influencer par des études financées par l’industrie ou des campagnes de relations publiques dans les magazines.
MOTS CLÉS : gaz de schiste, mobilisation, fracking.
Une transition énergétique citoyenne : un laboratoire d’expérimentation pour les politiques publiques locales ?
Frédéric BALLY (Université Pierre-Mendès-France Grenoble 2/(Laboratoire Lettres, Langages et Société – ED Science de l’Homme, du Politique et du Territoire)
L’énergie n’est plus infinie tel qu’on le croyait, mais elle reste l’enjeu d’innovation et de création d’une nouvelle perspective sociale (Raymond, 2013). Si de nombreuses injonctions à se comporter en éco-citoyen (Chavanon, Joly, Laforgue, Raymond, & Tabois, 2011) voient le jour sous l’aune de politiques publiques et des engagements internationaux, la société mise également sur une évolution technologique pour faciliter des comportements vertueux.
En parallèle se développent, s’organisent localement, via les citoyens ordinaires, des révolutions tranquilles (Manier, 2013). Le territoire de Lyon est par exemple le vivier d’un certain nombre d’initiatives citoyennes diverses en termes de valorisation des ressources naturelles et d’économie d’énergie : citons ici les jardins partagés, les habitats collectifs ou des mouvements citoyens comme Graines Rhône-Alpes ou Anciela qui mettent en avant un territoire durable. Cette liste non-exhaustive montre autant de terrains potentiels où les initiatives citoyennes prennent part à une autre définition de la notion de durabilité, d’économie (Lagane, 2011) et de sociabilité (Ripoll, 2010), en décalage, parfois en prolongement d’une vision institutionnelle.
Notre communication s’attachera à interroger les logiques et les potentialités de ces initiatives citoyennes au niveau local. Nous étudierons dans un premier temps la diversité de formes que prennent ces initiatives sur le territoire lyonnais, ainsi que leurs valeurs fondatrices, au travers de la manière dont ces acteurs citoyens s’associent.
Ensuite, il s’agira de montrer le rapport que peuvent entretenir ces initiatives citoyennes avec les institutions pour légitimer/ faire évoluer les politiques locales liées à l’énergie, pour in fine renouveler une logique bottom-up un peu oubliée.
MOTS CLÉS : éco-citoyens, développement durable, transition énergétique, acteurs ordinaires, sociologie des initiatives citoyennes.
Une centrale thermique en ébullition.
Ghislaine GALLENGA (Université d’Aix-Marseille–AMU/ Institut D’Ethnologie Méditerranéenne Européenne et Comparative – IDEMEC CNRS UMR 7307)
Si les thèmes de la transition énergétique – entendue ici comme un processus entre deux énergies : du carboné au non carboné – sont en France relativement récents dans le débat public, les thématiques liées à l’énergie sont beaucoup plus anciennes, en particulier dans les villes minières dans lesquelles le tissu social et économique comme la communication municipale reposent sur l’exploitation de la mine. Le slogan de la ville de Gardanne, petite ville ouvrière du Sud de la France, est justement « Gardanne, terre d’énergie », et la municipalité communiste désire que la ville soit la première à être autosuffisante en terme d’énergie.
Or, la ville est confrontée depuis 2003 à l’arrêt de l’exploitation minière alors que depuis plus d’un siècle l’unité de cet espace s’est forgée autour de l’exploitation du charbon et de l’industrialisation induite par la mine. La fermeture de la mine a été longuement préparée et a fait l’objet d’une stratégie de reconversion inscrite dans l’agenda gouvernemental de la transition énergétique. Pour autant l’arrêt de l’exploitation minière continue à exercer une influence dans les mémoires et le passé de la mine demeure prégnant à travers l’histoire sociale locale.
La centrale thermique – privatisée dès l’ouverture à la concurrence du secteur de l’énergie en 1995, et propriété d’un groupe allemand (au temps de l’enquête) – a entamé, depuis la cessation d’activité de la mine, une reconversion vers les énergies nouvelles renouvelables et une transition vers le mix-énergétique. Elle déploie ainsi des stratégies productives et économiques qui intègrent de nouvelles sources d’énergie non carbonées comme un parc photovoltaïque ou la biomasse. Elle prépare notamment sa transition du charbon importé – donc trop onéreux financièrement et écologiquement – aux granules de bois. Ce changement, en réponse à un appel d’offres européen, suscite l’inquiétude des salariés. Ces derniers ne voient dans le bois qu’une étape supplémentaire dans la fermeture inéluctable, selon eux, de la centrale, alors que la plupart d’entre eux a déjà vécu une première restructuration avec l’arrêt de la mine.
Comment toutes ces évolutions de l’arrêt de la mine au passage au bois sont vécues par le personnel de la centrale ? Que veut dire la transition énergétique pour les ouvriers qui la mettent en œuvre au quotidien ? Dans une centrale où les employés sont presque tous affiliés au syndicat de gauche la CGT (Confédération générale des travailleurs), quels sont les ressorts de la contestation ? Comment et sur quels arguments se cristallisent les peurs des salariés ? La transition énergétique n’apparaît-elle pas plutôt comme une menace, un facteur d’inquiétude qui s’ajouterait aux diverses incertitudes sur l’avenir depuis la crise charbonnière ? Ne serait-elle pas synonyme de dissolution d’une identité territoriale, d’une culture ouvrière ? Finalement, ne serait-elle pas qu’un leurre rhétorique destiné à accompagner des mesures économiques ?
Ce papier décrit ainsi la réception par les employés de la centrale thermique de la politique menée en faveur de la transition énergétique. Il se base sur une enquête ethnologique menée dans une équipe pluridisciplinaire. La méthodologie a été l’observation participante ainsi que des entretiens ouverts auprès des salariés de la centrale, des responsables du syndicat majoritaire, et de la municipalité. La direction de l’entreprise n’a pas, quant à elle, voulu nous recevoir. La recherche a été financée par l’Observatoire Hommes Milieu (OHM) du bassin minier de Provence.
MOTS CLÉS : ethnologie, centrale thermique, culture ouvrière, mémoire, mine.
La répression étatique des mouvements écologiques après le onze septembre 2001 et le pic pétrolier: le cas canadien.
S. Harris ALI (York University, Toronto, Canada)
Pour devenir une « superpuissance pétrolière », l’Etat canadien poursuit des stratégies intentionnelles pour déstabiliser et désarmer ses adversaires principaux : les groupes écologistes. L’Etat essaie ainsi d’affaiblir et même d’éliminer l’influence de ceux qui proposent la décarbonisation et la recherche des sources d’énergie renouvelables. Dans la perspective de la construction sociale, j’effectue une analyse du discours pour examiner la façon dont l’Etat canadien essaie de limiter la capacité du mouvement écologiste à contrer les projets d’extraire « le pétrole sale » des sables bitumineux de l’Alberta. Avec le soutien de l’industrie pétrolière, les stratégies étatiques pour contrer les groupes écologistes comprennent: l’inspection financière ciblant les groupes écologiques ayant un statut d’association caritative, les services de renseignement et la surveillance des militants écologistes, les moyens de museler les scientifiques au sein du service public, et un type d’action juridique, la Poursuite stratégique contre la mobilisation publique (poursuite-bâillon).
MOTS CLÉS : répression, écologisme, sables bitumineux, changement climatique, néolibéralisme, sécurisation.
Articulation entre la notion de “biens communs” ou “communs” et les coopératives d’énergie renouvelable.
Léa EYNAUD (Doctorante ADEME/ EHESS – Institut Marcel Mauss/ Centre d’Etude des Mouvements Sociaux)
La communication portera sur l’articulation entre la notion de “biens communs” ou “communs” et les coopératives d’énergie renouvelable. Si ce lien est souvent tracé dans les écrits des activistes – notamment les défenseurs de la notion de communs – et dans quelques ouvrages théoriques, on ne peut que déplorer le manque d’enquête scientifique portant sur les modalités empiriques de cette articulation. Notre contribution s’inscrit en réaction à ce constat. Dans une perspective pragmatiste notamment inspirée des travaux J. Dewey, elle proposera de s’interroger sur la manière dont les acteurs des coopératives d’énergie font expérience des communs, les définissent et les revendiquent dans le cadre de leurs actions concrètes sur le terrain – avec une attention particulière portée à la dimension exploratoire que ces processus recouvrent.
Dans quelle mesure et sous quelle(s) forme(s) la notion de « communs » trouve-t-elle sa place dans le cadre des activités pratiques et discursives auxquelles prennent part les acteurs des coopératives d’énergie (gouvernance en interne, choix éthiques au sujet des activités de fourniture et de rachat, communication auprès de consommateurs, lobbying et négociation politique, mobilisation au sein de mouvements sociaux, partenariats divers etc.)? Quelles sont les dimensions démocratique et environnementale d’une réappropriation de l’énergie sous le prisme des communs ? Inversement, la spécificité de l’objet énergie conduit-elle à une re-définition de l’acte de « faire commun » – par rapport à ce qui prévaut dans les autres domaines auxquels les communs sont plus souvent associés, tels que la connaissance ? Enfin, quelles sont les difficultés (voire les obstacles) politiques, institutionnels et juridiques auxquels se heurtent, sur le terrain, les activités de « mise en commun » de l’énergie ? Et comment les acteurs s’organisent-ils collectivement pour les lever?
La communication offrira un éclairage sur ces questions à partir des données collectées au cours des premiers mois d’enquête de la doctorante (soit depuis Septembre 2014). Elle s’appuiera sur un corpus d’entretiens réalisés au sein de la coopérative française de fourniture d’énergie renouvelable Enercoop ainsi qu’auprès de divers autres acteurs (élus politiques, activistes, concurrents, producteurs, consommateurs, fonds d’investissement citoyen etc.). L’analyse se fondera également sur un premier travail ethnographique réalisé au sein de la coopérative. Outre la réponse aux questions de recherche précédemment évoquées, notre contribution insistera sur l’intérêt heuristique et empirique d’un rapprochement entre communs et énergie pour penser la transition écologique. Elle apportera enfin un éclairage sur la méthodologie employée, notamment l’attention portée aux points de vue des acteurs et à l’enquête de terrain.
MOTS CLÉS :coopératives d’énergie, Énergie renouvelable, (Biens) communs, Transition écologique, Initiative citoyenne.
Vers une ethnographie filmique de la sobriété énergétique. Présentation de trois études de cas.
Violeta RAMIREZ (Université Paris Ouest Nanterre La Défense)
Le mode de vie actuel, très énergivore et fortement dépendant des énergies fossiles, entraîne de lourdes conséquences sur notre environnement actuel et sur la qualité de vie des générations futures. Le constat que le modèle d’une croissance perpétuelle est illusoire et néfaste, est devenu une évidence pour une partie de la population. En effet, des personnes ont pris acte de la situation de crise écologique et se sont orientées dans une voie alternative, celle de la frugalité. Ils réfléchissent et modifient leur façon de vivre au quotidien : logement, transport, alimentation, gestion des déchets, etc. Autant de leviers d’action concrets qu’ils conjuguent avec le souci de sobriété.
A partir des outils méthodologiques de l´anthropologie visuelle, nous réalisons une ethnographie filmée de ces individus, avant-gardistes au regard de leur mode de vie respectueux de l’environnement. Nous filmons et interrogeons ces personnes au sujet de leurs pratiques quotidiennes : approvisionnement d´aliments et d´objets, gestion de leurs déchets, déplacements, production d´énergies renouvelables, etc. Dans cette communication, nous présenterons trois profils d´individus engagés dans la sobriété énergétique, avec l´objectif de décrire leurs pratiques quotidiennes, rendre compte des motivations personnelles à l´origine de l´adoption de ce mode de vie et saisir les imaginaires de futur associés à ces pratiques.
MOTS CLÉS : décroissance, sobriété énergétique, anthropologie visuelle, ethnographie filmique, crise écologique.